Un polar "mathématheux"
Un matin, au réveil, je sus ce qu’il fallait faire. (…) Il fallait bien sûr s’approcher le plus près possible de nos limites respectives. Car c’est comme toujours aux limites, dans les frémissements des limites, que les événements extraordinaires peuvent nous arriver.
J’entrepris de convaincre Anne de s’unir pour de bon avec moi. Totalement, sans protection, jusqu’à l’enfant, si éventuellement un enfant nous arrivait. Je réfutai un par un tous ses arguments. Notre si grande jeunesse, surtout la mienne, l’argent que nous n’avions pas, notre relation si bizarrement commencée et tout de même assez récente... Je sus tout balayer. Elle se rendit assez vite à mes arguments, rieuse et comme rassurée. Mon amour lui allait bien.
Elle m’entraîna alors souvent dehors, et c’est en m’unissant à elle la nuit sur les pelouses centrales du grand jardin, cernées par le grondement atténué et sans fin des voitures de la ville, que je compris son goût des arbres, du ciel et de la pluie, mêlé au plaisir sexuel. La grande secousse nous prenait quand nous avions les yeux fixés sur les sombres nuages, et tout était magnifié. Nous n’étions plus qu’une scansion du monde. En même temps que je jouissais d’elle, j’appelais une lignée d’ancêtres lointains, et d’elle et de moi. Je poussais ma sève loin en elle, c’était l’amour, mais plus que l’amour, la déraison, l’ancrage, la réconciliation. Je m’unissais à elle, je l’intégrais, elle m’intégrait aussi, jusqu’à nos limites extrêmes.
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Titre La primitive intégrale
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Prix 14 €
Chez le même éditeur
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